« Il a 8 ans et il attend »

Raphaëlle RAAB

Il a 8 ans et il attend.
Il a 9 ans. Il attend.

Il a 13 ans, déjà des yeux usés à regarder la mer
avec des souvenirs de sel
collés le long des cils

Il a 28 ans, sa cabane est construite face à ce point qu’il fixe
sans arrêt.
Quand il ne peut plus, il compte les grains de sable en oubliant sa vie.

Il a 79 ans et un ami.
Ils se sont mis d’accord. Chaque matin, juste avant le lever du soleil, juste avant le levé des paupières, son ami passera sans bruit comme il en a l’habitude. C’est un grilleur de rêves. Tout est prévu. Les cendres se mêleront au sable.
Il tiendra bon.

Il a 103 ans et il a tenu bon.
Il attend toujours face à cette mer qui n’en finit plus de retenir les autres. On raconte que certains sont revenus après 100 ans. C’est par là qu’il va l’apercevoir.

Il a 148 ans. Il a compté cinq fois les grains de sable.

Il a 209 ans, désormais, il est polarisateur de boussoles.
Il sait qu’ainsi, lorsque les hommes existeront et navigueront, personne n’oubliera.
Personne n’oubliera que c’est de là, que son père lui reviendra.

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